Cité
millénaire du sud de la Cisjordanie, Hébron est connue pour
abriter le tombeau du patriarche Abraham. Pour les médias,
elle est aussi le symbole de l'occupation israélienne,
puisque des centaines de colons juifs vivent dans son centre.
Mais
c'est également
dans cette ville de 200 000 habitants que l'on confectionne les
seuls keffiehs de Palestine. Si le hangar posé au bord de la
route n'attire pas le regard, il suffit d'y pénétrer pour
remonter le fil d'un symbole national.
Le
keffieh est ce foulard arabe dont Yasser Arafat ne se séparait
jamais. L'ancien leader palestinien le portait blanc strié de
noir, maintenu avec un anneau de cordelette. Une photo de lui
trône dans l'entrée de l'usine d'Hébron, comme pour placer les
foulards produits ici sous le patronage de leur plus illustre ambassadeur.
Les Palestiniens ont adopté ce couvre-chef dans les années 1930
: les Britanniques, qui occupaient alors le pays,
généralisèrent, malgré eux, cette coutume, en décrétant
qu'ils considéreraient en opposants tous ceux qui portaient cette
coiffe masculine d'origine paysanne. |
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Aussi
souverain qu'un instituteur dans sa classe, Abdelaziz al-Karaki déambule
entre les métiers à tisser mécaniques pour traquer les
imperfections du tissu nouvellement
constitué. Une lame à la main, l'ouvrier coupe les fils qui dépassent
et passe ses doigts sur les foulards d'un geste tendre, comme pour
en effacer les plis.
Après
46 ans passés à l'usine, Abdelaziz s'est habitué à tout, même
au vacarme ambiant. « Il m'arrive de m'assoupir ici »,
raconte-t-il tandis que quatorze machines japonaises hurlent de
concert leur mélodie monocorde.
La
fabrique que dirigent aujourd'hui les frères Hirbawi a été fondée
par leur père Yasser en 1961. Leur entreprise emploie quinze personnes et vend environ 30 000 keffiehs par
an, principalement à des Occidentaux. Quelques visiteurs de
passage les achètent directement ici, tandis que des ONG les
exportent notamment par le biais de commandes « solidaires » sur
Internet. Quant aux
autres pays arabes, ils se contentent souvent de leur production
locale.
Ouest
France le 08/07/2015 |