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Palestine/Israël

Mission découverte 2022

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08/06/2022

AFPS Alsace

   

Au petit déjeuner répartition des savons achetés à Naplouse encore non attribués

Après le petit déjeuner nous quittons l’hôtel de Ramallah direction Hébron. Alors que la distance de Ramallah à Bethlehem est de 8 km et celle de Bethléem à Hébron est de 17 km en passant par Jérusalem, soit 25 km en tout pour aller de Ramallah à Hébron, aujourd’hui avec notre bus immatriculé en Palestine (plaques vertes sur fond blanc) nous devons contourner Jérusalem  en passant par des petites routes tortueuses et dangereuses car trop fréquentées pour leur taille, et le trajet fait plus du double (53 km), avec le passage de check points qui risquent à tout moment d’être fermés. Quand l’armée décide de fermer certains check points sur cette route, il n’y a plus aucune communication possible entre le Nord et le sud de la Palestine occupée.

Nous passons devant des villages dont certain se sont vus fermer toutes les entrées sauf une, par l’armée israélienne. Ils deviennent alors de vraies nasses où les habitants sont emprisonnés lorsque l’armée occupante ferme l’unique point d’accès, sans avis préalable

ssa nous fait remarquer les cultures en terrasses très répandues tout au long de la route, si coûteuses en temps de travail à l’installation, permettent de démultiplier la superficie cultivable et de réduire les déperditions d’eau de pluie ce qui est un avantage considérable à long terme. Il nous explique également que le raisin est en train de se développer très fortement dans la région, bien que comme toutes les cultures de produits frais elle reste une culture secondaire à usage local et régional. En variant les variétés cultivées et en utilisant habilement les techniques de réfrigération, on peut en effet consommer du raison quasiment toute l’année, de mars à janvier. C’est une culture moins importante que l’olive, mais c’est une culture familiale qui peut faire rentrer un revenu régulier sur pratiquement toute l’année

Issa nous indique l’emplacement d’une colonie juive sur le sommet d’une colline. Les eaux usées de cette colonie descendent par un canal à ciel ouvert sur la pente de la montagne et traversent un village palestinien en contrebas, où elle est décantée dans un bassin de décantation situé à côté du village. Une fois éclaircie cette eau est récupérée par les colons pour leurs cultures. L’usage de cette eau qui stagné à côté du village est interdit aux palestinien pour leurs propres cultures. Ils en ont tous les inconvénients, mais aucun avantage. Encore une forme de discrimination et d’apartheid

 

   

    Nous arrivons à Hébron. La  région d’Hébron compte 900.000 habitants soit le tiers de la Palestine occupée. C’est la première ville économique de Palestine, avant même Naplouse. Trent deux métiers artisanaux y sont encore exercés de façon vivante, du verre à la cordonnerie et à la fabrication de chaussures en passant par la céramique et la broderie. Hébron a obtenu le premier prix de la Fondation Artisanale Mondiale en 2016    

Nous arrivons à l’Université d’Hébron, Université créée en 1971,  où nous avons rendez-vous avec le département de Français à 10h.Nous sommes accueillis par le Professeur Brahim Moulouki, un marocain de langues maternelles française et arabe,  et deux de ses anciennes élèves, toutes prénommées AyatetHaya, l’une enseignante au Lycée de jeunes-filles de Dora, et l’autre qui est devenue inspectrice des professeurs de français de Hébron et sa région

   

Le Professeur Moulouki nous indique que le programme de formation au français  a été lancé à l’université Hébron en partenariat avec le Consulat de France en 2003-2004 et hébergé au département de langue anglaise, qui l’accueille encore aujourd’hui. La première promotion ne comptait que 6 étudiants. Ils sont 204 aujourd’hui, inscrits sur sélection. Monsieur Moulouki a ajouté « Nous disons toujours à nos étudiants qu’ils sont la future classe dirigeante de Palestine »

 

  

    

Une rencontre avec la Doyenne de l’Université d’Hébron, Madame Bensalah, et avec le  Délégué du Ministère de l’Éducation de l’Autorité Palestinienne, Monsieur Kamel Hajeh a été programmée. En attendant leur venue, des ateliers de discussion libre sont organisés. Un ou deux représentants de l’AFPS sont répartis entre plusieurs tables d’élèves du Lycée de Dora et du département de français de l’université, ce qui permet aux étudiants (en fait à plus de 80 % des étudiantes) de pratiquer leur français, et ce qui nous permet, à nous, d’avoir un premier aperçu de  leurs compétences linguistiques.

Le niveau des élèves du Lycée de Dora est bien entendu un niveau débutant, A1. Le niveau des élèves du département de Français est, en revanche, variable allant d’un milieu intermédiaire B1, à un niveau très avancé C1, voire C2, selon leur année d’étude

Débat avec les Etudians

À l’arrivée de la Doyenne de l’Université et du Délégué du Ministère de l’Éducation une tribune est organisée avec ces deux personnalités, Mireille Pelka pour l’AFPS et Anas et Ayla pour Ambition Jeunesse.

La Doyenne de l’Université d’Hébron nous souhaite la bienvenue. Elle nous rappel

le que l’enseignement du Français à l’Université d’Hébron fêtera ses 20 ans l’année prochaine. Elle insiste sur l’importance du français en tant que langue de communication internationale et notamment en tant que langue diplomatique, langue de traités internationaux

   

.Le Délégué du Gouvernement nous souhaite la bienvenue. Il reconnait que le français en Palestine est très souvent attaché aux traditions familiales. Il regrette que le français, langue de culture, mais également de sciences et de techniques ne soit pas plus souvent choisi par les étudiants. En effet le français est encore porteur de connaissance en matière scientifiques et serait un bon vecteur d’enrichissement du vocabulaire palestinien en matière de Sciences et de Sciences et Techniques

Mireille présente ensuite l’AFPS et son engagement en faveur de la liberté des peuples à disposer d’eux-mêmes sur leurs propres terres, et principalement du peuple Palestinien. Anas présente ensuite les actions d’Ambition Jeunesse au niveau européen et  sa volonté de s’ouvrir plus largement au monde extra européen et notamment à la jeunesse palestinienne.

À la suite de ces interventions des échanges ont lieu avec la salle dont il résulte combien l’extension de l’apprentissage du français en Palestine serait intéressant, tant pour créer un lobby pro palestinien en France et parvenir à obtenir du gouvernement français la reconnaissance de l’État Palestinien, qui serait très certainement suivie par d’autres états Européens, que pour permettre aux étudiants palestiniens de pouvoir suivre des formations  et des stages en France à la suite de leur diplôme en Palestine et d’accroître ainsi leur capacité de s’insérer au mieux sur le marché du travail tant palestinien qu’international. Des accords entre les universités françaises, et notamment celle de Strasbourg, à l’image de ceux existant avec l’université de Rouen, devraient pouvoir être établis et signés

Un étudiant provenant d’un camp de réfugiés palestiniens interroge le Délégué du Gouvernement sur la possibilité de créer des cours de formation de base en français pour les jeunes des territoires dans les camps de réfugiés. La réponse est non, par ce que les programmes de formation de l’UNWRA sont, en fait pris en charge par l’ONU qui en a la complète maîtrise d’œuvre. Si l’on veut atteindre un tel objectif, c’est donc sur l’ONU qu’il faut faire pression en passant par les instances politiques de nos différents pays.

Le Délégué du Gouvernement s’est en revanche engagé, en cas de demandes d’inscriptions croissantes aux cours de Français dans les établissements scolaires et dans les universités à ouvrir les classes nécessaires.

   

Après avoir écouté la chorale du Lycée Dora nous chanter une chanson en français, et un jeune ténor palestinien du département de Français nous chanter un chant arabe traditionnel, nous avons échangé nos adresses et pris congé de nos hôtes, puis nous sommes allez diner dans ce qu’Issa nous a présenté comme le meilleur Restaurant de Falafells d’Hébron : The King of Falafells. Et il avait bien raison. C’était très bon.

   

Nous avons ensuite visité la dernière fabrique de keffiehs d’Hébron et peut-être même de Palestine, l’entreprise Hirbawi Textile Factory. Elle fonctionne encore avec des métiers à tisser japonais datant de 1950, que les propriétaires sont obligés de réparer et d’entretenir eux-mêmes. Les pièces de rechange n’existant plus il est parfois nécessaire de les faire refaire à l’identique sur place à Hébron.. Ils ont bien essayé de travailler avec des métiers à tisser neufs, mais ils ne donnent pas satisfaction

   
Nous avons alors fait une razzia sur les keffiehs disponibles en magasin et sur bien d’autres choses encore, puis nous sommes partis pour visiter la Mosquée d’Abraham encore appelée mosquée des patriarches et le quartier palestinien environnant en voie de colonisation par les colons israéliens.

La vieille ville d'Hébron

Pour accéder à la Mosquée d’Abraham nous devons tout d’abord descendre dans la vieille ville dans un quartier de marchands ou tous les magasins sont fermés, situés dans la partie H2 d’Hébron que les juifs extrémistes sont en train de coloniser, en « récupérant» des biens juifs anciens, parfois en produisant de faux certificats de propriétés de propriétaires juifs ancien, ou en rachetant des biens à des palestiniens qui ne supportent plus le poids de la colonisation rampantes et de plus en plus rapide du quartiers, en expulsant sous le moindre prétexte les propriétaires légitimes , etc    
   

Les check point dans la ville

Nous devons ensuite passer deux contrôles successifs. L’un qui nous permet d’accéder à une zone mixte dans laquelle les colons se déplacent librement, caillassant parfois au passage les dernières maisons encore habitées par des palestiniens. Puis nous devons passer un second contrôle qui nous permet d’accéder à la mosquée d’Abraham. C’est cette mosquée que nous avons visité

 

La mosquée d'Abraham

  Voir l'articel

  

Il s’agit d’un bâtiment commun aux trois religions monothéistes de Palestine : le Judaïsme, le Christianisme et l’Islam. Le mur extérieur provient d’une enceinte fortifiée de 18 m de hauteur et 2,6 m d’épaisseur. Il a été édifié à l’époque d’Hérode le Grand, et constitue le second lieu saint pour les Juifs, après le Mont du Temple à Jérusalem qui fut détruit par les Romains et dont il reste aujourd’hui seulement le mur des Lamentations. Les Byzantins, sous le règne de La Reine Eléni, l’ont ensuite transformée en une église qui est détruite en 614 lors de l’invasion perse. Le site est transformé en mosquée par les musulmans après la conquête de la région par le calife Umar en 637, puis il est de nouveau transformé en église Saint Abraham lors des croisades. Saladin ajoute un minaret à chaque coin de l’enceinte après avoir conquis la région en 1188. Depuis cette époque, et jusqu’à la guerre des Six Jours en 1967, la population juive ne peut plus pénétrer à l’intérieur du monument, n’étant pas autorisée au-delà de la septième marche des escaliers qui y  conduisent.

 

Aujourd’hui, il s’agit d’un monument rectangulaire en pierre, orienté selon un axe nord-ouest/sud-est et divisé en deux parties de grandeur inégale : une mosquée dans la partie sud-est et une synagogue dans la partie nord-ouest qui occupe les 3/5 de l’édifice.

 

Le bâtiment est censé avoir été construit sur des grottes sacrées ou seraient inhumés Abraham, Isaac, Jacob et leurs épouses Sarah, Rébecca, et Léa.

 

Le conflit pour le contrôle et l’accès à l’édifice se poursuit à l’époque contemporaine et a déjà donné lieu à des épisodes de très grande violence. Car le rapport de force a changé en 1967, à la suite de la guerre des Six Jours et des débuts de la colonisation de la Cisjordanie, la minorité juive ayant pris l’ascendant sur la majorité musulmane. Dès son arrivée, elle négocie avec l’armée le droit d’accéder au caveau des Patriarches, provoquant une escalade de violence entre les deux communautés se sentant chacune dépossédée et réagissant par des actes de vandalisme de livres sacrés ou d’exactions physiques. La situation dégénère le 25 février 1994, un vendredi du mois sacré de ramadan, quand 29 musulmans en prière dans la mosquée sont abattus et 115 blessés par Baruch Goldstein, colon juif originaire des Etats-Unis, médecin dans l’armée et membre du parti d’extrême droite israélien du Kach, ensuite battu à mort par les rescapés. En novembre 2002, 12 israéliens (dont 9 soldats les accompagnants au retour de leur prière) sont tués dans une embuscade. La déclaration en février 2010 du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu affirmant vouloir intégrer au patrimoine israélien deux sites, le caveau des Patriarches et la mosquée Bilal ben Rabah où est enterrée Rachel, la seconde femme de Jacob, a aussi provoqué des heurts communautaires.[1]

Venant de la partie Palestinienne de la ville nous ne sommes pas allés visiter cette partie nord -ouest et le grand escalier qui y mène. Nous nous sommes contentés de contourner l’école palestinienne du quartier, photographier les maisons aux fenêtres grillagées des palestiniens qui y vivent encore, une grande partie d’entre eux ayant préféré rejoindre la partie H1 de la ville où l’on vit encore une vie normale. Nous avons été d’un point de contrôle à l’autre, assistant au passage de plusieurs groupes de jeunes juifs religieux fort peu avenants, et à leur rencontre un peu tendue avec un palestinien allant faire brouter ses chèvres sur quelque maigres buissons du quartier. Nous avons pu constater que tous les magasins du quartier « mixte », notamment ceux de la rue des Martyrs étaient fermés. Puis nous sommes ressortis par le point de contrôle utilisés à l’entrée donnant sur le vieux marché. Au passage une femme soldat nous a demandé si nous étions tous chrétiens. Nous n’avons pas répondu. Je craignais personnellement qu’elle n’en veuille à Anas et Ayla . Mais elle nous a tous laissé passer sans difficultés. Ce n’était visiblement pas son problème. Elle a rajouté : Il n’y a aucun juif parmi vous ? Je lui ai dit non. Aucun. Moi mon arrière grand père était juif. Mais moi je ne le suis pas. Elle m’a alors répondu : « Surtout ne le leur dites pas ! ».

Nous avons passé le tourniquet et avons jeté un coup d’œil aux quelques échoppes qui subsistent encore grâce au soutien du Comité de Réhabilitation d’Hébron. Au-dessus de nos tête sur toute la longueur de la rue s’étendent les filets dans lesquels les colons occupant les maisons attenantes de la rue des Martyrs jettent déchets et ordures afin d’offenser les palestiniens du vieux marché. Une atmosphère lourde nous entoure. Nous visitons un vieux moulin à sésame. Nous faisons quelques achats, plus par solidarité avec les commerçants que par réel besoin, et nous retournons prendre notre bus qui nous attend un peu plus loin, non sans remarquer la barrière type check-point et la porte  par laquelle l’armée israélienne peut à tout moment pénétrer dans cette zone car nous sommes encore en H2. La zone H1 commence 500 mètre plus loin. La zone normale. La normalité de la Palestine occupée. C’est loin d’être le Pérou.  Et on sait bien le respect qu’a l’armée israélienne des zones des accords d’Oslo et des accords passés. À peu près autant que celui des états-uniens pour les accords passés avec les habitants originels de l’Amérique du nord, aujourd’hui quasiment disparus

     

 Dernière visite de la journée avant de quitter Hébron et de prendre la route de Bethléem, celle des ateliers de souffleurs de verre et de poterie. Impressionnants souffleurs de verre travaillant avec une chaleur d’environ quarante degrés dans une atmosphère environnante de 30 degrés minimum. Anas s’est essayé au soufflage du verre. Un rêve d’enfants réalisé. De très belle poteries également dans la boutique attenante et quelques achats. Mais le cœur n’y était vraiment pas.

Nous sommes arrivés à 20h à Bethléem. Un bon repas. Et une nuit de rédaction de chronique. Bref la vie du témoin de l’AFPS Alsace en mission.

                                                                                                        Éric et Lily